Brésil : Fr. Luiz Santini, toujours actif à 80 ans

Après une vie apostolique des plus actives, il est responsable de l’accueil au CENTRO EDUCATIONAL MARISTA de MANAUS. (« Présence Mariste » n°237, octobre 2003)

Frère Luiz SANTINI semble ne pas avoir dépassé 80 ans… Après une vie apostolique des plus actives, il est responsable de l’accueil au CENTRO EDUCATIONAL MARISTA de MANAUS, à la lisière de la forêt amazonienne. C’est avec joie et simplicité qu’il a accepté de donner son témoignage.

Présence Mariste : Frère Luiz, SANTINI est un nom bien connu en France, dans le monde sportif aussi bien que politique.

Fr. Luiz : C’est un nom aussi très répandu au Brésil… J’appartiens à une famille d’agriculteurs d’origine italienne - mes quatre grands-parents étaient italiens - et traditionnellement chrétienne.
Mon père m’a enseigné à lire et à écrire à l’âge de 6 ans. Ensuite, j’ai fréquenté une école publique. L’institutrice avait dans la même salle de classe, les enfants qui apprenaient à lire et ceux qui terminaient leur scolarité primaire.

A l’âge de 14 ans, je suis rentré au collège des Frères Maristes de Santa Maria, (Rio Grande do Sul), pour achever mon instruction primaire.

Présence Mariste : La formation religieuse de cette époque était assez austère. Vous en gardez malgré tout un bon souvenir.

Fr. Luiz : A l’Institut Champagnat de Porto Alegre, je me suis senti tout de suite très à l’aise, comme en famille. Je commençai le noviciat le 21 janvier de 1941, à l’âge de 19 ans. Ce jour là le souhait insistant et quelque fois angoissant cessa complètement.
Ma formation a été ordinaire : noviciat, scolasticat, université, cours de recyclage spirituel, quelques cours d’extension universitaire, tant au Brésil comme à l’étranger.
Selon la formation Mariste reçue, j’ai toujours cherché à mener une vie simple, modeste et à faire le bien sans bruit et sans attirer l’attention.

Présence Mariste : Votre appel à la vie religieuse mariste est donc une suite normale.

Fr. Luiz : Oh ! Non, ce ne fut pas facile. Mes parents ne pouvaient payer des études longues à tous leurs enfants. J’ai quitté le collège mariste à regret et j’ai commencé à travailler à la ferme familiale.

Fr. Luiz SANTINI (assis au coin droit) au cours d’un repas dans le jardin de la résidence mariste à Manaus.

Nous habitions une pauvre petite maison en bois, avec sol en terre battue et sans plafond. Le vent froid « minuano » sifflait par les fissures des planches… Nous avions décidé d’en construire une autre en briques et plus spacieuse…

On m’avait parfois demandé si je voulais être ou prêtre ou frère et j’avais toujours répondu non. Mais à l’âge de 16 ans, vers 15 heures d’un jour très chaud, calme et silencieux, j’étais assis à l’ombre d’un arbre, près de la maison. Je préparais les légumes que mon père devait porter le lendemain au marché. J’ai eu comme une forte commotion : « Frère Mariste ! » Et j’ai décidé que je serai Frère.

Quelques jours après, j’ai dit à mon père :

« - J’ai décidé d’être Frère Mariste.

  • Qu’il en soit comme tu le veux.
  • Mais il me coûte de vous laisser dans cette maison !
  • Sans toi on ne pensera plus à en construire une autre…
  • Alors je renonce d’être Frère. »

Ce fut une résolution définitive. Mais après quelques heures, le désir d’être Frère est revenu avec insistance. Alors, après réflexion, j’ai décidé de suivre ma vocation seulement après avoir construit la maison.

Dès lors, à tous les travaux de la ferme, nous avons ajouté celui de la nouvelle maison. Aidé d’un ouvrier, nous avons commencé à charrier gravier, sable, briques, et à couper de gros troncs dans la forêt pour les amener à la scierie.

Je travaillais sans révéler mon intention. Je pensais pouvoir bâtir la maison en un an, mais il en fallut deux. Le désir d’être Frère me poursuivait toujours insistant et quelque fois angoissant..

En 1939 la famille est rentrée dans la nouvelle maison et alors j’ai révélé mon intention à mes parents. Ils furent d’accord. Je venais d’accomplir 18 ans. On m’a préparé le trousseau et en janvier de 1940, je suis parti pour le juvénat de Porto Alegre. Il fallait alors plus de 30 heures de train.

Présence Mariste : Frère Luiz, vous parlez très bien le français et vous connaissez bien notre culture. Comment les avez-vous développées ?

Fr. Luiz : J’ai passé une année et demie à Paris où j’ai fréquenté l’Alliance française et suivi quelques conférences à la Sorbonne. Tous les week-ends je les ai employés, accompagné d’un guide, à visiter les musées, les églises, les monuments.
Avec cela j’ai acquis une bonne connaissance de la langue, de la culture, de l’histoire, de la géographie de la France et de ses habitants.. Avant de retourner en Angola, j’ai acheté une centaine de livres de la collection Larousse, des cartes géographiques de la France, une vingtaine d’affiches touristiques.
Tout cela m’a permis de continuer à enseigner le Français, ce que j’ai fait pendant plus de 25 ans.

Présence Mariste : Votre vie apostolique est certainement très riche. Que pouvez nous en dire succinctement ?

Fr. Luiz : J’ai fait tous les travaux qu’on fait dans la Congrégation et exercé presque toutes les responsabilités. Mais ce fut surtout en classe que j’ai accompli ma mission pendant 50 ans dont plusieurs, au grand séminaire de Cruzeiro do Sul. (Brésil sud)
Mais les dix-sept ans passés en Angola ne peuvent passer sous silence. Il y aurait tellement d’expériences à raconter.

En classe c’était comme au Brésil, avec la seule différence qu’on y avait plus d’élèves noirs. Mais il fallait surmonter une certaine répugnance… Ils portaient un pagne et se baignaient seulement quand il pleuvait… Peu à peu on s’est habitué. Ils semblaient mal dégrossis, mais après quelques instants de conversation, on remarquait qu’ils avaient un cœur sensible. Eux et leurs familles sont très croyants et courageux dans leur Foi…

Dans ce pays de chaleur accablante, surtout à la saison sèche, appelée « cacimbo », où l’on a l’impression que le cerveau se volatilise. Ceux qui n’ont jamais vu une mission, ne se feront jamais une idée ni de ce qu’elle est ni de l’héroïsme des missionnaires. Le cimetière des Pères du SAINT-ESPRIT à Huila, où sont enterrés des jeunes Pères de 24, 28, 30 ans en est une illustration poignante…

Présence Mariste : En conclusion, Frère Luiz, qui est pour vous MARCELLIN CHAMPAGNAT ?

Fr. Luiz : Ce j’admire le plus en lui, c’est la conviction que Dieu voulait notre Congrégation. Ceci explique sa détermination d’aller de l’avant coûte que coûte, avec Foi, malgré les incompréhensions de quelques confrères. Avec lui et la Vierge Marie, à 80 ans passés, je chante mon MAGNIFICAT.

Présence Mariste : Merci, Frère Luiz !

Propos recueillis et adaptés par Frère Maurice BERGERET

(Publié dans « Présence Mariste » n°237, octobre 2003)

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