« Héros » : immédiatement après son assassinat, le mot était sur toutes les lèvres. Arnaud Beltrame est apparu comme tel par sa décision de se substituer à une otage au risque même de sa vie. Son engagement de militaire comme gendarme traduisant déjà sa volonté de servir son pays avec les risques que cela comporte. Sa décision de prendre la place de la caissière retenue en otage apparaît comme l’aboutissement logique de cet engagement.
Les Français lui ont rendu un hommage unanime, louant son courage, son dévouement, son patriotisme. Révélateur de cet hommage unanime, le titre d’un livre sur ce nouveau héros national : « Arnaud Beltrame, le héros dont la France a besoin ».
Attribuer au colonel Beltrame ce statut de « saint martyr » que l’Église catholique confère à de grandes figures est à envisager avec prudence, mais sans toutefois l’exclure. Ce sont surtout les organes de presse catholiques qui ont abordé cette dimension ; le « politiquement correct » étant de mise dans les médias officiels ! On a ainsi appris qu’Arnaud Beltrame était revenu à la foi chrétienne à l’âge de 33 ans et qu’après un mariage civil en août 2016, il devait épouser sa femme, religieusement, le 9 juin 2018. Pour son épouse, Marielle, dans un témoignage paru dans La Vie (N° 3787), il est clair « qu’on ne peut comprendre son sacrifice si on le sépare de sa foi personnelle. C’est le geste d’un gendarme et d’un chrétien ».
Même si ses proches réfutent de manière unanime le terme de « sacrifice », car il n’avait pas l’intention de mourir mais bien de neutraliser le tueur ou de gagner du temps, les chrétiens ne peuvent s’empêcher de faire le lien avec une parole du Christ « Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn15, 13). C’est bien ce qu’il a fait, in fine, à la suite du Christ. Il ne s’agit pas de canoniser trop vite Arnaud Beltrame, mais rien n’empêche les chrétiens de le considérer comme un chercheur de Dieu qui est allé jusqu’au bout de son engagement en risquant sa vie pour autrui comme un acte de pure charité.
Les propos de Jean Claude Monod, philosophe repris d’une interview parue dans La Vie (N° 3787) pourront servir, me semble-t-il, de conclusion à cette présentation du « cas Beltrame » en aidant à comprendre pourquoi cette personne a tellement interpellé les Français. Il dit : « Dans une société axée sur les biens matériels et la frénésie consumériste, où le nihilisme n’est jamais très loin, l’acte héroïque d’Arnaud Beltrame montre un horizon moral qui vient donner du sens à la vie et qui ouvre à une transcendance. »