
C’est le 18 juin 2015 que le pape François rend publique l’encyclique (la lettre circulaire) : Loué sois-tu ! sur la sauvegarde de la maison commune.
Il s’appuie sur les travaux et les déclarations de multiples conférences épiscopales et recueille à son tour « la réflexion d’innombrables scientifiques, philosophes, théologiens et organisations sociales » pour la rédiger. Dès les premières lignes, il souligne la gravité de la situation et surprend par la manière dont il parle de la terre, cette « sœur notre mère » (LS 1) qui
« crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle » (LS 2).
Les dégradations infligées à la terre sont perçues et analysées comme les symptômes d’une maladie qui touche le cœur de l’homme :
« La violence qu’il y a dans le cœur humain blessé par le péché se manifeste aussi à travers les symptômes de maladie que nous observons dans le sol, dans l’eau, dans l’air et dans les êtres vivants » (LS 2).
Refusant de ne considérer que les symptômes, le pape François recherche les causes profondes d’une telle situation afin de pouvoir
« proposer une écologie qui, dans ses différentes dimensions, incorpore la place spécifique de l’être humain dans ce monde et ses relations avec la réalité qui l’entoure » (LS 15).
"parmi les pauvres les plus abandonnés et maltraités,
se trouve notre terre opprimée et dévastée"
Tout est lié…

François nous dit cette expression et c’est comme un refrain tout au long de l’encyclique.
« Paix, justice et sauvegarde de la création sont trois thèmes absolument liés, qui ne pourront pas être mis à part pour être traités séparément » (LS 92).
« Tout est lié. Il faut donc une préoccupation pour l’environnement unie à un amour sincère envers les êtres humains, et à un engagement constant pour les problèmes de société » (LS 91).
Mais il est un lien particulier que souligne le pape et qui est au cœur de l’encyclique et de ses préoccupations : celui de la pauvreté ! Les pauvres sont la porte d’entrée de cette encyclique et il n’hésite pas à écrire que
« parmi les pauvres les plus abandonnés et maltraités, se trouve notre terre opprimée et dévastée » (LS 2).
La clameur de la terre et la clameur des pauvres sont indissociables car
« la détérioration de l’environnement et celle de la société affectent d’une manière spéciale les plus faibles de la planète : « Tant l’expérience commune de la vie ordinaire que l’investigation scientifique démontrent que ce sont les pauvres qui souffrent davantage des plus graves effets de toutes les agressions environnementales » (LS 48).
C’est pourquoi « une vraie approche écologique se transforme toujours en une approche sociale » (LS 49).
Citant la conférence des évêques catholiques des États Unis d’Amérique le pape insiste pour que l’on se concentre « spécialement sur les besoins des pauvres, des faibles et des vulnérables » (LS 52), dans des débat souvent dominés par les intérêts des puissants.
Recherche d’une écologie intégrale

Si tout est lié c’est du côté d’une écologie intégrale qu’il faut chercher.
« Étant donné l’ampleur des changements, il n’est plus possible de trouver une réponse spécifique et indépendante à chaque partie du problème. Il est fondamental de chercher des solutions intégrales qui prennent en compte les interactions des systèmes naturels entre eux et avec les systèmes sociaux. Il n’y a pas deux crises séparées, l’une environnementale et l’autre sociale, mais une seule et complexe crise socio-environnementale. Les possibilités de solution requièrent une approche intégrale pour combattre la pauvreté, pour rendre la dignité aux exclus et simultanément pour préserver la nature » (LS 139).
Une très belle et très juste définition de l’écologie intégrale est donnée par Gaultier Bès :
« L’écologie intégrale ne choisit ni l’humain contre la nature ni la nature contre l’humain. Elle cherche au contraire à réconcilier l’humanisme et l’environnementalisme, à faire la synthèse entre respect absolu de la dignité humaine et préservation de la biodiversité. Promouvoir l’écologie intégrale, c’est reconnaitre qu’on ne saurait défendre l’une sans protéger l’autre, se soucier des plus fragiles sans s’opposer à tout ce que nos modes de vie peuvent avoir de dégradant et de destructeur. Car la détérioration de notre environnement ne peut qu’entrainer notre propre déshumanisation ».
Une nécessaire conversion !

« Nous avons besoin d’une conversion qui nous unisse tous, parce que le défi environnemental que nous vivons, et ses racines humaines, nous concernent et nous touchent tous » (LS 14).
Dans le premier chapitre qui fait l’état des lieux de la planète le pape dénonce l’écologie superficielle qui « consolide un certain assoupissement et une joyeuse irresponsabilité » (LS 59). Il constate :
« Comme cela arrive ordinairement aux époques de crises profondes, qui requièrent des décisions courageuses, nous sommes tentés de penser que ce qui est en train de se passer n’est pas certain. Si nous regardons les choses en surface, au-delà de quelques signes visibles de pollution et de dégradation, il semble qu’elles ne soient pas si graves et que la planète pourrait subsister longtemps dans les conditions actuelles. Ce comportement évasif nous permet de continuer à maintenir nos styles de vie, de production et de consommation. C’est la manière dont l’être humain s’arrange pour alimenter tous les vices autodestructifs : en essayant de ne pas les voir, en luttant pour ne pas les reconnaître, en retardant les décisions importantes, en agissant comme si de rien n’était » (LS 59).

Un appel particulier est adressé aux disciples du Christ :
« La crise écologique est un appel à une profonde conversion intérieure. Mais nous devons aussi reconnaître que certains chrétiens, engagés et qui prient, ont l’habitude de se moquer des préoccupations pour l’environnement, avec l’excuse du réalisme et du pragmatisme. D’autres sont passifs, ils ne se décident pas à changer leurs habitudes et ils deviennent incohérents. Ils ont donc besoin d’une conversion écologique, qui implique de laisser jaillir toutes les conséquences de leur rencontre avec Jésus-Christ sur les relations avec le monde qui les entoure. Vivre la vocation de protecteurs de l’œuvre de Dieu est une part essentielle d’une existence vertueuse ; cela n’est pas quelque chose d’optionnel ni un aspect secondaire dans l’expérience chrétienne » (LS 217).