« La communauté des Frères de Varennes-sur-Allier est en fête. EIle célèbre le centenaire de la construction de son bâtiment principal avec la chapelle.
La Province mariste du Centre fut fondée en 1876. Elle se trouvait, faute de ressources, privée de Maison Provinciale. En vue de la construction de cette maison, un terrain assez vaste et bien situé fut acheté à Varennes-sur-Allier.
Pendant les années 1890-91, ce fut un chantier énorme pour l’époque. Les matériaux furent amenés à pied d’œuvre dans des tombereaux traînés par des chevaux. La pierre fut extraite à Montaigu-le-Blin, le sable dans l’ Allier ; la pierre des angles et des fenêtres venait, par chemin de fer, de Saint-Denis de Cabannes, près de Charlieu. L’architecte était M. Collet, de Roanne. »
Maison Provinciale des Frères Maristes à Varennes-sur-Allier
vue aérienne.
Inauguration de la Maison Provinciale
« Les Supérieurs avaient décidé que les Frères feraient leur retraite à Varennes en 1891 et que le noviciat y fonctionnerait dès la fin des vacances. En mai 1891, une communauté de six Frères vint de Saint-Genis-Laval s’installer à Varennes. Le travail n’allait pas lui manquer. En juillet d’autres Frères vinrent aider à cette immense organisation où tout était à faire.
Enfin, tout fut prêt le 16 septembre 1891 pour la bénédiction de la maison et la retraite qui commença le lendemain. Dans une circulaire du F.Théophane, supérieur Général, on lit :
« “ La bénédiction solennelle de la chapelle n’a pu être faite par Mgr de Dreux-Brézé, Evêque de Moulins (alors âgé de 80 ans), une indisposition ne lui ayant pas permis de s’y rendre. Mr l’Abbé Vichy, Curé de Varennes, a été délégué pour la cérémonie de la bénédiction. Les Frères, tout heureux d’unir leurs prières à celles de l’Eglise, ont pu se convaincre en voyant la vaste et belle maison qui leur avait été préparée, que tout vient à point à celui qui cherche avant tout le royaume de Dieu et sa justice. ” »
Formation à la vie religieuse
« Le noviciat, hébergé à Saint-Genis Laval, arriva trois jours après la retraite et fut reçu dans l’enthousiasme. Le scolasticat s’ouvrit le même jour avec une vingtaine de Frères étudiants. En 1894 fut créé le juvénat pour accueillir les aspirants à la vie religieuse. Un autre juvénat existait à Digoin. Chaque juvénat recevait une moyenne de 60 jeunes et c’était le bon temps.
« Pour répondre à la demande de Mgr de Dreux-Brézé, on construisit en 1892 une école gratuite de deux classes en bordure de la rue du 4 septembre. Cette école comptait 40 élèves dès septembre 1893. La fin du siècle fut la période la plus prospère pour la maison des Frères à Varennes. Il y avait à cette époque dans la Province du Centre près de 400 Frères qui dirigeaient 95 écoles dans les diocèses de Moulins, Clermont, Nevers, Autun et Bourges.
La tourmente de 1903
« Le XX° siècle s’ouvrit sous le signe de la menace. La loi sur les associations fut votée le 1er juillet 1901. C’est le 3 avril 1903 que le Parlement rejeta sans examen la demande d’autorisation de l’Institut des Frères Maristes. Les écoles reçurent notification officielle, signée Combes, de fermer dans un délai plus ou moins long. En Bourbonnais, plusieurs écoles maristes se trouvèrent anéanties en 1903, notamment celle de Varennes, ainsi que le juvénat, le noviciat et le scolasticat.
Une belle caravane
« Le 1er mai, après des adieux émouvants à ceux qui restaient en France pour sauver les œuvres, quarante volontaires, jeunes pour la plupart et le corps professoral, quittaient Varennes. La « Nef du Salut » les débarquait à Beyrouth le 9 mai et la colonie mariste était accueillie par les Frères du Liban. Les quarante exilés de Varennes se fixèrent à Amchit et la formation des jeunes put continuer.
1903 à Varennes : départ d’un groupes de Frères pour la Syrie
Rachat de la maison de Varennes
« Tous les biens de la Congrégation se trouvaient versés aux Domaines. Les Frères obligés au repos en raison de leur âge ou de leurs infirmités restaient à Varennes. La maison et la propriété allaient être mises en vente. Sous la présidence de M. Gendre, négociant à Varennes, une société immobilière fut créée par des bienfaiteurs. Le rachat eut lieu le 18 décembre 1906 pour 46.300 F. La maison provinciale conserva ainsi son caractère religieux.
Pendant la guerre de 14-18
« En août 1914, la maison accueillit un groupe important de jeunes réfugiés du Nord de la France. L’année suivante, l’administration militaire réquisitionna une partie de la maison, appelée "Caserne Puisieux" pour une école de mitrailleurs. La première école de gendarmerie de l’Allier fut ouverte dans la maison le 9 mars 1918. Ce centre fut transféré à Moulins après douze mois de fonctionnement intensif au cours desquels furent formés 2.500 gendarmes.
L’incendie de 1922
« Le 10 juillet 1922, un violent incendie se déclara en pleine nuit au troisième étage et détruisit entièrement la maison provinciale. Toute la structure intérieure étant en bois, le feu s’étendit rapidement. La population de Varennes fut admirable de dévouement pour recueillir les Frères retraités qui furent ensuite transportés à St-Chamond et à St-Genis-Laval.
« Quel serait le sort de cette maison ? “Qu’on la relève de ses ruines” fut la décision du Frère Diogène, Supérieur Général et de son Conseil. La restauration fut confiée à M. Genermont, architecte à Moulins. Un an après, la maison ouvrait fièrement la grande porte de sa belle façade et ses vastes salles aux Frères de la Province venus pour la retraite de 1923.
Fondation du second juvénat
« En juillet 1927, un petit groupe de juvénistes de La Valla-en-Gier venait se fixer à Varennes, avec Fr. Sénateur pour Directeur, sous le patronage de Saint Joseph. Grâce à l’apport de plusieurs juvénats, en 1947, on put réunir une centaine de jeunes sous la direction du Fr. François Morel. Avec la crise des vocations, il n’y a plus de juvénistes depuis 1968.
Retour du noviciat
« Alors que grondaient des menaces de guerre, les jeunes Français de la maison de Bairo (Piémont) et des autres noviciats réfugiés en Italie, furent invités par les Supérieurs à retourner dans leurs anciennes demeures. La maison de Varennes reçut un renfort de 7 Frères, 18 novices et 25 juvénistes le 1er avril 1939. Le noviciat sera réuni à celui de St-Genis-Laval en 1945.
La guerre de 1939-45
Après la débâcle de 1940, la maison hébergea 200 vieillards de l’hospice de Bar-le-Duc qui avait été évacué. Ils restèrent jusqu’en novembre.
En 1941, une centaine d’élèves-officiers établit ses quartiers dans la maison. Le 11 novembre 1942, ce fut le tour des soldats allemands d’occuper les lieux. A la Libération, un groupe de prisonniers allemands a séjourné jusqu’en 1948.
Restauration de la chapelle
« Depuis l’incendie de 1922, la grande chapelle n’avait pu être rétablie. Sa restauration, confiée à M. Lefort, architecte à Vichy, s’est effectuée splendidement, Mgr Jacquin, évêque de Moulins, procéda à la bénédiction solennelle le 7 mai 1953.
La manufacture des orgues Schwenkedel de Strasbourg a réalisé un orgue de douze jeux qui a été inauguré le 24 juin 1970.
Les orgues Schwenkedel
« En 1948, épris de bel canto, Fr. Robert Guglielmetti et Fr. Grivel lancent une chorale… Chants, motets, messes à quatre voix, avec l’appui d’un bel harmonium de 22 jeux et 2 claviers, acheté aux Pères Trappistes de Sept-Fons.
Bien entraîné, le groupe de choristes - chemise blanche, cravate bleue - se produit à la cathédrale de Moulins, au théâtre de Vichy, avec “ A Cœur Joie” de César Geoffray.
Un harmonium, c’est bien, mais… on peut toujours rêver !
Les Frères anciens combattants offrent spontanément leur retraite pour financer l’achat d’un orgue. Fr. Hilaire Détraz, Provincial, s’adresse, en 1964, à la maison Schwenkedel de Strasbourg… L’éxécution du projet demande du temps. En octobre 1967 est inauguré un orgue de 8 jeux, complété en 1970 par 4 jeux supplémentaires.
Un groupe de jeunes en formation à Varennes vers 1950
Maison de retraite
« En préparation du Centenaire, la rénovation de l’établissement vient d’être réalisée par un architecte de talent, M. Ramillien. Le Frère Provincial et son Conseil ont voulu donner plus de confort aux Frères âgés et malades et améliorer l’accueil.
Après de longues années consacrées dans l’enseignement, soit en France, soit à l’étranger, Chine, Liban, Hongrie, Madagascar, Canada, Brésil, ces religieux éducateurs bénéficient, dans le cadre agréable de Varennes, d’un repos bien mérité.
Leurs journées se partagent entre la prière, la lecture, de menus travaux choisis par eux selon leurs goûts et leurs forces. De plus, les Frères collaborent avec les prêtres et les laïques : monde scolaire, catéchèse, mouvement eucharistique des jeunes, vie montante…
« Dans leur maison, les Frères accueillent volontiers des groupes : enfants, jeunes, mais aussi des adultes pour des séminaires d’une journée.
Aujourd’hui
« Dans le hall d’entrée, une carte présente les 75 pays où les 6.000 Frères Maristes exercent leur apostolat. A côté, La Vierge aux Enfants, sculptée à l’occasion du Centenaire par M. Robert Gaime, du Mayet-de-Montagne. La Vierge porte dans ses bras deux enfants qui se donnent la main. Marie, Mère des hommes : symbolisme éloquent pour la mission des Frères Maristes auprès des jeunes.
2001 : Frère Constans Arandel fête ses 100 ans.
A Varennes avec sa famille et ses confrères
M. Ramillien, architecte, et les entrepreneurs qui ont rénové la maison, ont généreusement participé à l’acquisition de la Vierge du Centenaire
« En ce Centenaire, les Frères de Varennes s’unissent à leurs confrères pour remercier le Seigneur par Marie du don fait à l’Eglise et au monde en la personne de Marcellin Champagnat. L’éducation chrétienne donnée aux jeunes par les nombreux Frères formés dans cette maison suscite leur action de grâces. »
Fr. Jean PORTAL (Présence Mariste n° 188, avril 1991)