Dans la déclaration universelle des droits de l’Homme le mot ’’Homme’’ s’écrit avec une majuscule, celle-ci signifiant qu’est concerné tout être humain, dont les enfants à l’évidence. Pourquoi dans ce cas la notion de ’’droits des enfants’’ est-elle apparue ? Pourquoi une convention internationale relative aux droits de l’enfant a-t-elle été élaborée, dans quel but et pour quels droits ?
Émergence des Droits de l’Enfant
Longtemps l’enfant a été considéré comme la propriété de ses parents ou de la communauté ; au XVe siècle et surtout au siècle des Lumières, l’intérêt qu’on lui porte s’amplifie ; il faudra attendre le XIXe pour que les premières lois soient édictées, notamment pour réglementer le travail ou imposer l’instruction.
Le CIDE concerne tous les enfants
du monde sans discrimination
C’est au début du XXe siècle que des pédagogues, tels Janusz Korczak ou Célestin Freinet, élaborent des textes pour une éducation respectueuse de l’enfant, de sa dignité et de ses besoins particuliers.
Naissance de la Convention Internationale
relative aux Droits de l’Enfant (CIDE)
Le premier organisme à se préoccuper de la situation des enfants naît au sein de la Société Des Nations en 1919 sous la forme d’un Comité de protection de l’enfant ; il produit la première déclaration des droits de l’enfant dite Déclaration de Genève. Celle-ci va inspirer la Déclaration des Droits de l’Enfant adoptée à l’ONU le 20 novembre 1959.
L’enfant n’y est encore considéré que comme objet de droit ; trente ans seront nécessaires pour qu’il accède au statut de sujet particulier avec des droits qui lui sont propres.
En 1979, Année internationale de l’Enfant, 43 membres de la Commission des Nations Unies pour les Droits de l’Homme commencent l’élaboration du texte de la Convention, il leur faudra 10 ans.
Le 20 novembre 1989, il est présenté à l’Assemblée générale de l’ONU qui l’approuve à l’unanimité de ses membres.
Quel rôle pour la Convention ?
La Convention a un double rôle.
- Pour les États : elle est contraignante et stimulante.
Une fois qu’ils ont ratifié la Convention, les pays doivent répondre devant la communauté internationale de son application.
Ils s’engagent à la faire connaître à leurs ressortissants et à accepter les contrôles du Comité onusien des Droits de l’Enfant. (Comité créé pour suivre les progrès de l’application de la Convention)
Les rapports envoyés à ce Comité sont
« une occasion précieuse pour l’État d’analyser comment il met en œuvre la Convention, quels succès il a remporté dans la promotion et la protection des droits de l’enfant, et quelles carences demeurent ».
L’enfant : un être humain à part entière
concerné par l’ensemble des droits de l’homme
Pour la mise en œuvre de la Convention et l’élaboration des rapports au Comité des Droits de l’enfant les pays sont aidés par l’UNICEF et des ONG. Cependant la Commission n’a pas le pouvoir de demander des comptes aux gouvernements pour leur action (ou leur inaction) à l’égard des enfants.
- Pour les enfants : elle est protectrice.
La Convention fournit un cadre moral et juridique commun pour élaborer les plans d’action en faveur des enfants et pour évaluer les progrès accomplis. C’est sur elle que s’appuient les ONG et l’UNICEF pour faire connaître les droits des enfants et aider à leur application.
Quels droits pour les enfants ?
La CIDE considère l’enfant comme un être humain à part entière. Il est donc concerné par l’ensemble des Droits de l’Homme, mais sa vulnérabilité et ses besoins spécifiques justifient l’édiction de droits qui lui sont propres.
L’élaboration de la CIDE s’est faite en référence à la situation des enfants dans tous les pays du monde
« indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre… » (art. 2 de la Convention).
Droit au respect de sa culture d’origine
Jeunes Maoris de Nouvelle Zélande
La CIDE définit les droits fondamentaux de tous les enfants du monde sans discrimination et dans l’intérêt supérieur de l’enfant.
Ils se déclinent concrètement ainsi :
- droit à la santé : nutrition, accès à l’eau, soins de santé primaires et préventifs,
- droit à l’épanouissement intellectuel : éducation, jeu, activités culturelles,
- droit à une protection particulière contre toutes les formes de violence : guerre, travail aliénant, exploitation sexuelle, torture, vente, traite et enlèvement et
- droits civils et politiques : droit à une identité, à l’expression et à l’information, liberté de pensée, de participation et d’association, droit à une famille et droits de cette famille.
Respect des Droits de l’Enfant
Si la Convention fut unanimement adoptée, cela ne signifie pas qu’elle est partout appliquée ; les manquements au respect des Droits de l’Enfant sont nombreux, la pauvreté et la guerre en sont les causes les plus fréquentes ; les rapports annuels sur la situation des enfants dans le monde publiés par l’UNICEF sont accablants : 1 enfant sur 4 vit dans la pauvreté et 2 millions sont morts à cause de la guerre en une décennie.
Malgré les pressions exercées sur les gouvernements, malgré les aides apportées par l’UNICEF et les ONG la litanie des souffrances endurées par les enfants reste longue : malnutrition, SIDA, trafics et violences de toutes sortes.
Certes, les progrès réalisés depuis l’adoption de la Convention ne sont pas à la hauteur des promesses et des espoirs, mais il ne faut pas, pour autant, oublier les avancées obtenues par les multiples défenseurs de la cause des enfants, notamment :
- la libération des enfants-soldats au Libéria,
- l’engagement du gouvernement thaïlandais dans la lutte contre la prostitution enfantine,
- l’éradication presque totale de la poliomyélite,
- la diminution considérable de la mortalité due à la rougeole et
- l’abaissement du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.
Vigilance dans les pays industrialisés, dénonciation et aide dans les pays pauvres, la défense des Droits de l’Enfant demeure une priorité absolue et nécessite la participation de chacun.
C’est au regard de l’avenir de l’Humanité que l’engagement pour la défense des Droits de l’Enfant trouve sa justification : un enfant privé de droits sera un adulte aliéné.
Mme Colette Grange
UNICEF, St-Etienne (Loire)
(Publié dans « Présence Mariste » n°254, janvier 2008)