La planète est assurément pleine d’une diversité de gens…
Certains, très fortunés, cherchent à épater les autres. Ils achètent la voiture dernier cri, possèdent plusieurs résidences secondaires de préférence sur la Costa Brava ou la Côte d’Azur et placent leurs capitaux en Suisse.
D’autres sont dominés par « boulot-télé-dodo ». Ils font parfois de folles dépenses jusqu’à ce que leur compte bancaire soit complètement aplati. Ils n’hésitent pas alors à acheter à crédit et se trouvent un jour surendettés jusqu’au cou sans savoir comment sortir du pétrin.
Ces deux catégories de gens pensent surtout à eux-mêmes et prétendent qu’ils n’ont pas le temps de penser à ceux qui galèrent pour vivre et survivre.
D’autres encore vivent une certaine sagesse tels que les bouddhistes. Ils s’efforcent d’éliminer la souffrance en réduisant leurs désirs. Ils pratiquent la non-violence et croient à la réincarnation.
Je fais là à coup sûr, une présentation tout à fait schématique.
Je passe maintenant à une autre catégorie de gens, nombreux dans nos sociétés occidentales. Leur vie laborieuse n’est pas luxueuse car ils pensent quelquefois à ceux qui manquent de tout ; ils sont prêts à aider les défavorisés qui leur sont proches ou qui vivent au loin. Pour eux, tous les êtres humains ont droit à la liberté, à la dignité. Mais ils ont des doutes sur l’existence de Dieu notamment parce qu’ils constatent les inégalités criantes dans le monde et sont choqués par l’appât du gain d’une minorité qui écrase les faibles et se livre à des guerres fratricides. On peut dire que ces gens donnent un certain sens à leur existence terrestre ; ils vivent pour le moins une « spiritualité humanitaire ».
Regard vers le haut
Il existe aussi des personnes qui croient à un être supérieur, créateur de l’univers et de tout être et qui s’est révélé aux hommes de quelque manière. Ce sont les croyants des religions. Sans ignorer les juifs et les musulmans, je me bornerai à parler ici des croyants qui se disent chrétiens.
Ils ont une spiritualité qui concerne leur vie terrestre et leur avenir dans l’au-delà de la mort. Ils ne se jugent pas meilleurs que les autres car ils éprouvent leur faiblesse et reconnaissent que leur foi vient de plus loin qu’eux ; ils la considèrent comme un don reçu de Dieu.
La spiritualité chrétienne n’est pas une simple théorie. Elle est essentiellement un chemin, une manière d’aller à Dieu et de se comporter à l’égard des semblables.
On pourrait la présenter sous trois aspects principaux :
marcher en présence du Père,
vivre sa vie en Christ et
offrir sa vie à la consécration de l’Esprit Saint.
* Marche en présence du Père :
Dans le Livre de la Genèse (17,1), Dieu dit à Abraham : « marche en ma présence ». Marche sur ton chemin, mais avec la volonté d’aller vers le Père qui t’a créé à son image et qui t’attend.
* Vis ta vie en Christ :
Que l’Évangile puisse toucher ta vie. Suis le Christ sur un chemin de profonde humanité. Jésus a refusé toute violence pour contrer le mal. Pour comprendre le mystère pascal, c’est-à-dire le passage de Jésus par la mort pour aller à la résurrection, fréquente les petits, les humiliés, les découragés. Le Fils de Dieu s’est fait limité, vulnérable pour encaisser le péché du monde. Là où l’homme est au plus bas, Dieu est encore là.
* Offre ta vie à la consécration de l’Esprit Saint :
Dans le sacrement, en apparence, nous agissons en posant des gestes (ex. pour le baptême, nous recevons l’eau sur le front), mais en réalité, dans la foi, nous nous offrons à l’Esprit Saint qui transforme notre vie. Nous croyons à l’Esprit dans l’Église.
Efflorescence des spiritualités
L’Esprit Saint ne manque pas d’imagination. Il ouvre à l’homme des multitudes de chemins vers Dieu que sont les différentes spiritualités.
Au cours des siècles, il a inspiré des hommes et des femmes à prendre des chemins spécifiques pas seulement pour eux mais aussi pour beaucoup d’autres.
Ainsi, François d’Assise, en vivant intensément la pauvreté, la joie évangélique, la louange de Dieu à travers les créatures, a ouvert la spiritualité dite « franciscaine » qui inspire encore la vie d’hommes et de femmes de notre temps.
Dans un siècle où les cœurs risquaient de se dessécher par l’influence néfaste du matérialisme et des courants scientistes, Thérèse de Lisieux a montré à tous la « petite voie » de l’amour vécu au quotidien.
De nos jours, où beaucoup d’êtres humains sont aux prises avec le stress, l’éparpillement et la désespérance, le Frère Roger de Taizé a rayonné une spiritualité de l’engagement et de « la paix du cœur » (lutte et contemplation), et nombre de jeunes qui passent par Taizé disent : « Taizé, c’est super ! »
On pourrait continuer à énumérer les spiritualités initiées par beaucoup de témoins de l’Évangile : Dominique, Thérèse d’Avila, Ignace de Loyola, Marcellin Champagnat, Charles de Foucauld…
Par extension, on peut parler de la spiritualité du couple et de la vie familiale, de la spiritualité du travail professionnel et des loisirs…
Le chrétien bien enraciné dans sa foi ecclésiale vit une manière un peu différente selon que l’on est à Noël ou au temps de Pâques…
Recherche spirituelle
Notre société sécularisée a entraîné l’éloignement de la mémoire chrétienne. Mais après la mort de grandes idéologies et l’écroulement du mythe du bonheur par le seul progrès technique et matériel, une quête spirituelle s’exprime aujourd’hui avec une certaine acuité. Elle peut apparaître avec un caractère flou qui fait papillonner dans le supermarché des modes de vivre, ou avec un caractère très subjectif qui enferme la personne sur soi. Elle peut au contraire se traduire d’une façon très authentique : le désir effectif de Dieu.
Une quête « christianisée » décentre de soi et ramène aux urgences du monde : « aime Dieu et … ton prochain ! »
L’Esprit est bien à l’œuvre dans nos vies et dans celles de nos frères et sœurs. Il ne faudrait pas se laisser envahir par les chocs émotionnels que le petit écran risque de provoquer en nous !
Le chrétien éveillé est attentif aux signes positifs qui émergent dans notre monde bouleversé. On est trop facilement impressionné par le bruit de l’arbre qui s’abat et on reste inattentif à la poussée silencieuse du blé qui monte.
Ami lecteur, à la belle saison, il t’arrive de t’étendre sur l’herbe des champs ou sur le sable de la plage. Tu laisses alors le soleil caresser ton corps et tes membres, de ses rayons et de sa chaleur.
Qui que tu sois, ne crains pas de pratiquer assidûment le bronzage spirituel : en toute saison, prends au moins quelques instants pour exposer ta personne à Celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie. Tu te sentiras bien toi-même. Et tu rayonneras autour de toi un brin d’amour et de beauté !
Frère Marcel SOUTRENON (†)
(Publié dans « Présence Mariste » n°255, avril 2008)