Le visage marial de l’Eglise, chez nous, frères maristes

Avec Marie, partez en hâte vers une terre nouvelle

Une icône de la Vierge Marie a pris, au cours du dernier Chapitre général, une importance première : c’est la Vierge de la Visitation : une mère, une femme, une laïque en mission.
Le document de ce Chapitre est tout ponctué de cette icône et du slogan : « Avec Marie, partez en hâte vers une terre nouvelle ! » Les animateurs des retraites, dans les Provinces ont éprouvé le besoin de donner chair à cet appel prophétique. En même temps, un thème de réflexion émergeait : celui du « visage marial de l’Église » : Marie, la mère, la femme, la laïque qui prête son visage à l’Église, qui révèle à l’Église un aspect important de sa nature profonde.
Comme Marie de la Visitation, partir en hâte

À l’Hermitage, deux représentations significatives de Marie

La première, dans la salle des fresques, à l’entrée, représente Marie avec l’enfant. L’enfant est au niveau du cœur, cœur de l’icône et cœur de la mère, comme si toute l’aventure du salut s’expliquait par le cœur : carrefour de l’amour et de la foi.

La deuxième est la statue dorée de la Vierge dans la chapelle ; à son cou est suspendu un cœur. Dans ce cœur, Marcellin plaçait le nom des Frères qui allaient partir « en hâte vers une terre nouvelle ! ». Comme si la mission n’avait de sens et de hâte qui si elle avait mûri dans le cœur de la Mère.

Belle et lourde responsabilité !

Pour nous Maristes, c’est énorme d’avoir pour tâche de rendre concret « ce visage marial de l’Église » : faire que nos paroles, nos relations, nos amitiés, notre travail soient filtrés par le cœur, première exigence pour un mariste : « Pour bien éduquer, il faut d’abord aimer ! ». Et chaque Frère, vivant le charisme de Marcellin, devient source de mille initiatives en faveur des jeunes et des pauvres.
Il fait éclore des printemps de sourires, de joies d’un nouveau savoir conquis ; les moments de tensions se dénouent en paix, tandis que mûrit dans les jeunes « le citoyen honnête et le bon chrétien ».

Fresque de N-D de l’Hermitage

Le visage marial de l’Église, qu’est-ce à dire ?

C’est un cœur et une présence de mère, de femme, de laïque , présence qui fait marcher l’Église sur la route des pauvres. Marie conduit au Christ, mais elle conduit aussi toujours à l’homme. Vivre avec Marie, c’est se donner un surcroît d’humanité. Voilà que nous découvrons un nouvel aspect des saints et de Marie : ils sont des champions d’humanité.

Comme mère, Marie présente une autre dimension, celle du sens de la responsabilité. L’amour est toujours tempéré par le sens de la responsabilité qui ouvre à l’enfant les routes de la liberté. Entre la mère et l’enfant, il y a une union faite de mille choses, et en même temps une distance pour que l’enfant ne soit pas une copie conforme, mais grandisse vers sa propre personnalité. L’Église aussi doit rester sensible à sa responsabilité pour conduire les fidèles vers leur liberté, vers une vraie croissance personnelle dans le Christ.

Par son amour, par son intelligence, la mère tisse le fond de la psychologie de l’enfant. Entre Marie et Jésus, il y a eu toute cette densité d’humanité : la mère a pénétré dans toute son épaisseur la personnalité de Jésus. La première expérience humaine que Jésus a faite a été celle de se sentir aimé. Le premier visage que Jésus a contemplé est celui de sa mère ; dans ce visage, il a puisé la paix. C’est aussi le dernier visage qui a rempli ses yeux et il nous a fait don de la Mère.

Statue de la Vierge dans la chapelle de N-D de l’Hermitage


Ceci est une parfaite icône de l’Église et du mariste  : dans la patience des jours, nous tissons une infinité des liens qui permettent aux autres : frères, amis, jeunes, enfants, parents, de devenir les personnes uniques qu’ils sont. L’Église et l’éducateur, comme Marie, doivent d’abord être amour, laisser primer leur réalité maternelle, tempérée par le sens de la responsabilité. Si l’Église regarde Marie, elle découvre qu’elle doit d’abord être mère. D’abord, il y a eu la mère et l’enfant, puis le prophète et les apôtres.

Visage marial sont aussi tous les gestes que les femmes font dans les évangiles et dans l’Église  : Marthe invite Jésus dans sa maison, espace de paix et d’amitié. Marie verse un pur parfum de nard sur les pieds de Jésus et toute la maison en est remplie ; la pécheresse couvre de baisers les pieds du Seigneur, les baigne de ses larmes puis les essuie de ses cheveux : pur génie féminin. Les femmes sont fidèles à la croix et premières messagères de la résurrection. Elles évangélisent Pierre et les apôtres. Elles sont toutes des laïques, comme Marie. Elles forment encore aujourd’hui la base solide de l’Église.

La mission naît du cœur

Dans le cœur naît le visage marial de l’Église, visage de mère, de femme, de laïque, cœur que tout mariste doit cultiver. Dans le cœur de Marcellin sont nés les premiers missionnaires pour l’Océanie, puis l’explosion missionnaire de 1903, Henri Vergès en Algérie, Servando et ses compagnons au Congo, et les Frères qui, aujourd’hui, partent pour la mission ad gentes pour aider les gens à lire le Cœur de Dieu.

Comme pour Marcellin c’est du cœur que naît toute mission

La mission, cependant, ne se mesure pas en kilomètres. Elle est toute entière dans le trésor dont le cœur est riche : Jésus, le Seigneur. Et aucun missionnaire ne peut réchauffer, éclairer, réjouir, s’il ne brûle d’abord lui-même. La mission est passion qui devient « la hâte de Marie vers une terre nouvelle. »

La fraternité : un don de Marie

Des jeunes Polonais étaient surpris de l’absence de prêtres parmi nous.
Je leur ai dit : « Oui, nous cultivons la fraternité ! » Une lumière neuve a brillé dans leurs yeux. La fraternité est le don que Marie nous a fait. La fraternité n’a aucune prétention à dominer, elle est accueil, respect, promotion de l’autre. C’est typiquement marial. Marie offre à l’Église un visage de mère, de femme, de laïque qui n’a d’autre prétention de pouvoir sinon celui d’un amour désarmé, gratuit et responsable. Ce visage précède les dogmes, les rites, les homélies, l’autorité ; il les humanise et les rend aimables. Il n’est en rien opposé à l’autorité, au contraire, il la réchauffe et alors Pierre peut dire : « Seigneur, … tu sais bien que je t’aime ».

Frère Jean Marie BIGOTTO (Rome)
(Paru dans Présence Mariste N° 266, janvier 2011)

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