A 20 km de Vichy, « ville d’eaux éternelle », non loin de Moulins, « capitale historique », se situe Le Mayet - de - Montagne, centre de la Montagne Bourbonnaise, au paysage aimable fait de variété et de mesure. Ceinturée par les Monts de la Madeleine et ceux des Bois Noirs, cette région possède de riches vallées agricoles. Si l’on y ajoute cette richesse moderne que constitue le plus riche filon français d’uranium de St - Priest - la - Prugne, on aura tout dit sur cette contrée près de laquelle fut écrite l’Astrée, référence supplémentaire au charme de cette région.
Le voyageur qui arrive au Mayet est surpris d’y trouver tant de bâtiments scolaires : C.E.G. public mixte, Institution St-Joseph pour les garçons, Notre - Dame pour les filles, école d’agriculture et Centre d’Apprentissage Ménager. On arrive ainsi à la proportion de 1.000 élèves pour 2.000 habitants. Peu de cités peuvent se vanter d’une telle proportion toute à la gloire de la capitale de la « Montagne ».
… Celle de tous les dévouements qui contribuèrent a créer ce qui devait devenir l’Institution St-Joseph. L’initiateur en fut M. Fournier, curé du Mayet. Comme beaucoup de prêtres clairvoyants de ces années 80 où la laïcité menait grand tapage, il tenait à faire donner une bonne éducation chrétienne aux enfants de sa paroisse. Déjà les filles avaient leur école Notre-Dame dirigée par les Sœurs de la Présentation, mais il n’y avait rien pour les garçons, et M. Fournier, généreux jusqu’à l’oubli de soi, était pauvre.
Or, sur la paroisse s’élevait une fabrique de lainages appartenant au Baron Hussenot, du Nord. Celui-ci estimait l’intransigeante loyauté de M. Fournier et les deux hommes se voyaient souvent. M. Fournier fut donc le premier informé lorsque le Baron décida, vu certaines difficultés d’exploitation de sa fabrique, de quitter le Mayet.
_ Et votre bâtiment ? demanda M. Fournier.
— _ Je vais l’abandonner. Qui pourrait l’acheter ?…
Depuis cinq ans que le Curé cherchait une solution au problème d’une école de garçons !… N’était-ce pas là un appel de la Providence ?
Il réfléchit, supputa la dépense, consulta et… quelques jours après, rendait sa visite à M. Hussenot.
_ _ Monsieur le Baron, je vous achète votre usine pour en faire notre école de garçons. Mais je n’ai pas d’argent liquide et vous paierai au fur et à mesure des rentrées…
— Soit, dit l’interlocuteur, en lui tendant la main j’accepte votre offre. Les bâtiments sont à vous ; faites-en ce que vous voudrez. Vous me paierez quand vous pourrez, je ne vous demande pas d’intérêts.
Les Frères Maristes dirigeaient
alors une école à Châtel-Montagne
Or, à ce moment, les Frères Maristes dirigeaient à Châtel-Montagne, un petit pensionnat qui végétait. M. Fournier alla donc à Varennes, plaida si bien sa cause qu’au printemps 1886, les Frères arrivaient au Mayet et s’attaquaient aux transformations et aménagements, nécessaires. D’emblée, la population les adopta. Et M. Fournier, dès qu’il était libre, montait gaiement au haut du bourg où l’on travaillait activement et où sa présence galvanisait tout le monde. En octobre, les pensionnaires de Châtel rentraient au Mayet, plus central et plus facile d’accès, et l’école pouvait ouvrir. M. Fournier, déjà guetté par la mort eut cependant l’immense joie de pouvoir bénir les locaux et les mettre sous la protection de saint Joseph.
A Frère Eucaire, fondateur, succéda Frère Jean l’Evangéliste, maître éducateur, qui étendit encore la réputation de la maison. En classe avec lui, c’était là vie et il ne permettait à personne de dormir ou de rêvasser. Dans la cour, il était premier au jeu et certains jeudis quand il annonçait « grand jeu de paume » c’étaient de belles parties de plaisir en perspective. Les culottes et tabliers avaient parfois du mal, mais les écoliers ne s’en souciaient guère… Il fut le créateur de la fanfare, qui dans d’homériques exhibitions à travers les communes voisines, attiraient un nouveau lustre à Saint-Joseph.
Les années s’écoulaient heureuses dans une maison ou il y avait cependant fort à faire pour la maintenir en forme.
TOURMENTE : en 1903, les Frères disparaissaient…
En 1903, les Frères disparaissaient. Frère Victorius, précédemment sous-directeur, fut remplacé par un homme en barbichette et redingote qui lui ressemblait comme un frère. C’était M. Molle qui devait continuer longtemps la tradition laissée par les Frères au Mayet. Avec deux aides, la vie continua, sur les bases solides du dévouement et de la piété.
A partir de 1924, une amicale, longtemps rêvée, vit enfin le jour et sa première assemblée générale eut lieu le 14 septembre. Elle demeura très active en faveur de l’Institution jusqu’en 1939, pour ne reprendre vie qu’après la guerre et le retour des prisonniers.
Dès 1950, il apparut que les écoles du Mayet étaient ou trop vétustés ou trop étroites. Un puissant mouvement de rénovation s’amorce en 1956 sous la direction du chanoine Mercier, nouveau curé du Mayet. Avec une audace remarquable et sans argent d’avance, il agrandit l’Ecole Ménagère libre. L’année suivante, il entreprend une nouvelle école Notre-Dame pour loger 150 internes. Un nouveau C.E.G. public se construit en 1959. De 1960 à 1962 s’élève le bâtiment moderne de l’Ecole d’Agriculture. Enfin, à partir de mai 1962, après plusieurs réfections de détail, de grands travaux commencent à St-Joseph.
COMPAGNONS-BATISSEURS
II faut commencer par démolir l’ancien préau sur lequel s’élèvera le nouveau bâtiment. Durant les grandes vacances 1962, deux équipes de compagnons-bâtisseurs belges et hollandais travaillent courageusement sur le chantier amorcé, étonnant la population par leur dynamisme et leur exemple. Et, à la rentrée, parents et élèves constatent avec une pointe d’orgueil, que les maçons amorcent un 2e étage. Malheureusement, un hiver rigoureux arrête les travaux qui ne reprennent qu’à la belle saison.

On peut ainsi procéder, le 21 juillet 1963, à la bénédiction des nouveaux bâtiments. Elle eut lieu sous la présidence de Mgr Bougon, évêque de Moulins, en présence d’une foule enthousiaste entraînée par la chorale des juvénistes de Varennes et de Langon (en colonie à Varennes). La messe fut dite sous le nouveau préau devant la foule des parents, des Anciens et des Amis de l’école. A l’Evangile, Monseigneur manifesta la joie que lui procurait cette inauguration et mit en relief l’importance toujours plus grande d’une maison déducation chrétienne. Puis, ce fut la bénédiction du préau, des huit nouvelles classes et d’un dortoir, que l’on s’empressa d’admirer à la suite de Mgr Bougon. Après la cérémonie, banquet traditionnel où, à l’heure des toasts, tous les artisans de la réalisation étaient publiquement remerciés. Les Anciens Elèves étaient dignement représentés par leur président, M. Fayet, maire du Mayet.
RENTRÉE 63
Quelle différence avec les années précédentes ! Fini l’éparpillement de 35 internes à travers les familles du bourg. Désormais, les dortoirs peuvent loger les 190 pensionnaires présents. Deux classes doivent être doublées (6e et 5e) ; huit classes prennent allègrement possession des nouveaux locaux tandis que deux classes moins favorisées se contentent des pièces habituelles. Les anciennes classes sont transformées en études. La cuisine modernisée avec un fourneau Molteni à propane permet au chef de servir tout son monde avec moins de peine.
ET DÉJÀ RENTRÉE 64…
Un 2e chantier étant ouvert, il y aura, l’an prochain, place pour une chapelle, une vaste salle d’études et un dortoir. Ainsi l’Institution St-Joseph sera bien installée et avec un confort que les anciens n’ont pas connu. Que le puissant protecteur de cette maison continue à veiller sur elle, à lui accorder une prospérité toujours croissante. Et les jeunes qui sortiront de cet établissement seront fiers de leur Alma Mater et resteront dignes de leurs Aînés et de l’excellente éducation chrétienne qu’ils auront reçue.
LE SCOUTISME
Tout le monde sait que le scoutisme veut donner à un groupe de jeunes garçons volontaires un idéal qui consiste en l’amélioration des qualités physiques et morales. Qualités physiques par des marches, de grands jeux de plein air, des camps où l’on apprend à construire des meubles de diverses sortes ainsi que la cuisine, etc.. Qualités morales par un excellent esprit d’une communauté saine où l’on apprend à s’entendre, à se connaître et à s’aimer en se soutenant, à vivre dans un bon esprit religieux, grâce à la visite de l’aumônier. Bref, le scoutisme permet aux jeunes de devenir des hommes capables des chrétiens fiers de leur foi. Et Dieu sait si notre monde a besoin de ces hommes. C’est avec cette idée qu’une « troupe » a pris le départ au Mayet. A vrai dire, cette troupe est ouverte car elle admet non seulement les élèves mais les jeunes de l’extérieur.
Effectifs : 38 scouts y compris les chefs et nous formons ainsi une « troupe modèle » de quatre patrouilles de huit, avec quatre assistants (dont trois élèves de 3e et un surveillant), un chef de troupe (surveillant tout comme le chef hors cadre qui a des fonctions multiples et non des plus reposantes. Notre aumônier est celui de l’école. i Jusqu’ici nos activités ont consisté surtout à aménager notre local où ont pris forme un atelier, un labo-photo, une salle Topo et une salle Nature. L’inauguration a eu lieu alors que la troupe est née à Noël seulement.
Sorties peu nombreuses encore mais déjà un camp a eu lieu à la mi-février. Les chefs pensent au camp des grandes vacances (à Andorre, s’il vous plaît !) tout en préparant pour Pâques le premier camp sous la toile.
Bref, la troupe du Mayet est bien lancée, les autorités scolaires compréhensives, les élèves sympathiques, les locaux attrayants. Grâce aux méthodes scoutes, le jeune saura regarder la vie en face, vaincre les difficultés journalières et accourir à l’aide de ceux qui sont en détresse. Puisse Notre-Dame Montjoie nous y aider ! (Un scout)
LE SPORT
Tout un éventail de jeux et sports est offert aux élèves de St-Joseph suivant saisons et goûts : foot-ball, basket-ball, volley, rugby, ping-pong, et prochainement hand-ball.
Mais le plus attrayant est certainement le karting. Tous les futurs Pangio rivalisent d’adresse pour boucler les tours dans le minimum de temps en utilisant les dérapages contrôlés (!…) à la Stirling Moss. Malheureusement, pour le moment, un seul « kart » est disponible. On attend de nouvelles unités.
En sport d’équipe, le foot reste roi avec une équipe Minimes et une de Cadets. Les Cadets sont à rude tâche, devant combattre des équipes de lycées bien fournies en joueurs. Quant aux Minimes, ils sont en tête (fin janvier) de leur poule avec 3 victoires, un match nul et 3 défaites. Souhaitons-leur le titre de champions 63-64 qui couronnerait magnifiquement un entraînement sérieux, appliqué et toujours courageux.

Les basketteurs sont fiers de leurs progrès : ils viennent de battre l’équipe des « moniteurs-professeurs ». Enfin les pensionnaires roannais ont lancé le rugby à 13. Après des débuts plutôt pénibles, il semble que nos rugbymen aient assez de technique pour accepter des défis de l’extérieur.
Pour faire un tour d’horizon complet des activités de St-Joseph, mentionnons la section de modélisme dont les passionnés peuvent déjà faire admirer leurs belles réalisations : la vedette Harco-40 (1 m de long) et le contre-torpilleur « LE TERRIBLE » (1,36 m) à moteur électrique qui évoluent sur le lac du Mayet à la grande joie des spectateurs, grands et petits.
Ainsi nos élèves ont la possibilité, outre leurs études, de se livrer pour leur plus grand bien, à diverses activités et jeux où leur corps peut se développer harmonieusement pour les luttes futures de la vie.
(Publié dans « Voyages et Missions » n°81, avril 1964)