
La nécessité de prendre en compte le fait religieux dans l’enseignement est venue non pas des instances de l’Enseignement catholique ou de l’Église, mais de l’État… Elle est née d’un constat résumé dans le rapport Jutard, en 1989 :
« c’est un pan entier de notre mémoire collective qui est menacé. L’ignorance du religieux risque d’empêcher les esprits contemporains, spécialement ceux qui n’appartiennent à aucune communauté religieuse, d’accéder aux œuvres de notre patrimoine artistique, culturel et philosophique ».
Dix ans plus tard, Jacques Lang, Ministre de l’Éducation Nationale, sur les conseils de Régis Debray, et selon les termes de ce dernier, accompagnera le passage d’une laïcité d’incompétence – au sens que le fait religieux était considéré comme hors de la compétence de l’Éducation Nationale – à une laïcité d’intelligence.
La non-reconnaissance des religions affirmée par la loi de 1905 ne signifie pas méconnaissance ! La réintroduction du fait religieux dans la culture générale permettra de lutter contre les peurs, contre toutes les formes de racismes, et contre la xénophobie… et favorisera donc le vivre ensemble.
C’est ainsi que depuis le début de ce siècle, l’approche culturelle du fait religieux est instaurée dans l’enseignement, qu’il soit public ou privé, pour tous les élèves et pour tous les enseignants… Elle se fait à l’intérieur des disciplines, à partir des programmes. Une telle démarche est nécessairement non-confessionnelle parce qu’elle vise la connaissance et la compréhension des phénomènes religieux propres à chacune des différentes religions, et non l’adhésion aux croyances.
Mais les choses ne sont pas aussi simples… Le fait religieux, pour les religions elles-mêmes, ne saurait se limiter à ce qu’il en est dit dans les textes ! Ce serait accréditer le fait que la foi fait bon ménage avec la crédulité et ruiner le sens même des religions. Les récits épiques de la Bible – entre autres – ne sont pas le reportage d’événements qui se seraient déroulés tels qu’ils y sont rapportés. Ils sont le fruit d’une élaboration, inspirée d’une intention qui ne demande qu’à se laisser découvrir. La vérité du texte n’est pas à rechercher dans la lettre du récit, mais dans ce qu’il signifie… Cette symbolique fait, elle-aussi, partie du fait religieux.
Et ceci nous amène à deux remarques :
- Des professeurs, y compris dans l’enseignement catholique, se disent insuffisamment préparés à cet enseignement du fait religieux et de sa symbolique.
- Même s’ils ont cette formation, certains s’interrogent sur le seuil qui sépare l’enseignement de la symbolique du fait religieux et la croyance… et donc sur le respect pour eux du principe de laïcité…
- La Laïcité, prise comme le rejet de toutes les religions, est paralysante. Il faut se battre, et se battre encore, pour qu’elle soit toujours comprise, non pas comme la négation du religieux, mais comme le ferment d’un dialogue entre les différentes composantes de notre société, entre les gens de religions différentes, et entre ceux qui ont une religion et ceux qui n’en ont pas !