Société et école.
Professeur chrétien dans un lycée public de la région stéphanoise, ce n’est pas un hasard des concours, ni une chimère ! C’est un choix conscient pris, il y a déjà une dizaine d’années. C’est probablement lié aussi à un parcours scolaire dans des écoles publiques en tant qu’élève.
Pourtant enseigner dans un établissement scolaire laïc, ce n’est pas renoncer à ses convictions religieuses même si nous ne pouvons pas faire état en classe de notre appartenance confessionnelle.
Si les enseignants sont tenus de respecter une stricte neutralité, la société influence toutefois la vie de l’école. L’école a un rôle d’émancipation qui suppose le respect des identités et leur dépassement pour former de futurs citoyens acteurs d’un destin commun partagé.
Ainsi je crois que cette approche laïque permet aux enseignants d’être détachés de leurs sentiments religieux personnels dans leur pédagogie et dans les leçons.
L’histoire des religions au programme.
En tant que professeur d’histoire géographie, je suis amené souvent dans mes cours à évoquer l’histoire des religions.
En classe de seconde, on étudie le chapitre sur la naissance et la diffusion du christianisme, mais aussi sur l’islam au XIIe siècle, la Réforme protestante au XVIe siècle.
En classe de première et de terminale, on assiste à une approche plus contemporaine des événements religieux.
Former de futurs citoyens acteurs d’un destin commun partagé.
Si enseigner le fait religieux est important face à l’inculture religieuse de nos adolescents pourtant en quête de recherche spirituelle très disparate, il convient de bien séparer l’approche confessionnelle de l’approche historique.
Dans la présentation de mes cours, je cherche toujours à bien faire la distinction entre le fait historique et la croyance religieuse d’un fait qui est une adhésion personnelle. Ce n’est pas contradictoire que de dire qu’au matin de Pâques commence la croyance en la Résurrection de notre seigneur Jésus-Christ (à laquelle les élèves ne sont pas obligés d’adhérer) mais aussi de dire que parce que des hommes ont propagé cette Bonne Nouvelle, notre Histoire s’en est trouvée profondément bouleversée.
Le christianisme est devenu un élément fondateur et structurant de notre civilisation européenne.
La laïcité, une chance.
Ainsi j’ai le sentiment d’être plus impartial dans l’exposé des contenus scientifiques disciplinaires.
D’autre part, l’école doit, pour des raisons historiques et culturelles, être attentive à l’apparition des grandes religions monothéistes (le judaïsme, le christianisme, l’islam), ainsi qu’aux contestations qu’elles engendrent dans notre monde moderne. Et c’est là qu’il faut souvent dépassionner le débat !
Face à la montée des intégrismes ou des fondamentalismes religieux de tous horizons, la laïcité est une chance pour faire comprendre aux élèves les dérives sectaires et ma neutralité me permet plus facilement de condamner les atteintes à la dignité de l’homme prônées par certains fanatiques religieux. Je crois donc que la laïcité est une solution aujourd’hui pour combattre les extrémismes de toutes parts.
Pour finir, comme je dis souvent à mes élèves, la laïcité à l’école, c’est un espace areligieux et non antireligieux. Elle doit conduire à la tolérance et à l’acceptation de la diversité religieuse des enfants même si je reste conscient qu’il y a aussi des dérives avec certains « laïcards » toujours prêts à en découdre avec l’Eglise.
Professeur chrétien, je le suis et je le reste avec cette fierté d’essayer de le vivre dans un lycée public. Sans oublier, et c’est le plus important, de porter un regard doux, juste et compréhensif sur nos élèves comme nous l’avons appris de l’éducation mariste d’après Marcellin Champagnat.
Christophe GRAILLON
(Publié dans « Présence Mariste » n°248, juillet 2006)