Cette fondation est originale : c’est le Mexique qui a implanté la première Communauté Mariste dans ce pays en 1991.
Interview de Frère Juan VELASCO, réalisée par Frère Michel MOREL
Frère Michel MOREL : Comment vous est venue l’idée d’une mission en Tanzanie ?
Frère Juan VELASCO : Le Frère Charles Howard, Supérieur Général, a lancé un appel à des Provinces ayant beaucoup de nouveaux Frères pour implanter la présence Mariste dans un pays où les Frères n’étaient pas présents et où il y avait demande de fondation. Notre Chapitre Provincial a répondu à cet appel. En juillet 1991, le Frère Provincial me nomme Supérieur et me donne comme compagnons, les Frères Teodoro et Francisco qui s’étaient portés volontaires.
Une fois nommés, nous nous mettons d’accord sur la manière de rejoindre l’Afrique : pèlerinage à Fourvière pour recommander la nouvelle fondation à Marie, retraite à N. D de l’Hermitage et puis passage à Rome pour recevoir les autorisations d’entrée au Kenya.
M.M : Comment s’est fait le choix du diocèse de Musoma, et celui du terrain d’apostolat ?
J. V. : Mgr Justin ZAMBA, évêque de ce lieu, avait rencontré Frère Charles Howard, en vue d’une fondation. Deux Frères de la Province firent une recherche sur place pour voir les possibilités en divers lieux de Tanzanie. Il s’avéra que le mieux était d’accepter l’invitation de l’évêque de Musoma.
Puis, avec l’évêque, nous avons discuté des divers apostolats possibles : prendre en charge une ferme, à Makoko, que laissaient les missionnaires de Maryknoll et de s’occuper de la formation d’agents en pastorale familiale et paroissiale ; ou bien diriger le séminaire de Musoma situé tout près de la ferme de Makoko ; ou encore prendre en charge l’école de Masonga où les parents avaient construit quatre salles mais jusque là, l’école ne fonctionnait pas. Nous avons fait notre discernement et avons choisi l’école comme terrain d’apostolat, vu que c’est ce que nous faisons habituellement.
M.M : Comment réagissent les élèves face à la proposition de l’Evangile selon la vision de l’Eglise catholique ?
J. V. : A l’école, nous avons 60 % de catholiques et 30 % d’autres religions ; les autres sont animistes. Tous les élèves savent que l’école est catholique et ils l’acceptent pleinement.
M.M : Durant ces onze années, quel a été le rayonnement de la mission mariste ?
J. V. : Tout d’abord, nous avons lutté très fort pour les droits de la femme malgré le désaccord de quelques pères de famille. Mais les parents, les « Anciens » ont admiré et reconnu les valeurs d’humanité de l’éducation mariste : esprit de famille, respect… et d’autre part, ils sont satisfaits des résultats scolaires.
Les élèves se sont familiarisés avec de nombreuses techniques simples pour l’amélioration de l’agriculture. Cela s’est traduit par une diversification de l’alimentation et par une foule de progrès relatifs au travail des femmes.
M.M : Comment voyez-vous l’avenir Mariste dans cette région d’Afrique ?
J. V. : Nous devons d’abord informer les élèves sur ce que sont les Maristes pour qu’ils sachent réellement ce qu’est un Frère.
Ensuite, il faut suivre attentivement le cheminement d’une vocation. Les problèmes sont réels. Par exemple, le vœu de chasteté est difficile à comprendre dans un milieu où la polygamie est considérée comme normale et où il est primordial d’avoir des enfants. Il y a aussi un risque de percevoir la vie religieuse comme promotion culturelle et humaine plutôt que réponse à un appel de Dieu.
M.M : Quelles sont les perspectives de cette nouvelle Province de l’Afrique de l’Est ?
J. V. : Il y aura une aide mutuelle entre les divers secteurs. La différence de langues n’est pas un problème insurmontable, vu que dans la région, la langue commune est le swahili. Si nous la prenions comme langue pour toute la Province, ce serait un énorme avantage.
Nous comptons encore sur une aide des autres Provinces de l’Institut par l’intermédiaire de la caisse générale de Rome. Il nous faut des moyens financiers pour poursuivre notre mission, mais cela n’est pas le plus important.
(Publié dans « Présence Mariste » n°236, juillet 2003)